vous présente
Une rue dans tes oreilles
D’Hiver en Amérique
​
Tout a débuté par un très grand voyage…
Mon petit-enfant
Ben oui entre, oui, viens me voir.
Comme ça, ta mère me dit que tu te poses des questions?
Que les réponses que tu cherches ont plus la cote et que tu t’inquiètes pour ta mémoire?
Bien sûr que je peux te dire d’où tu viens
Mais il va falloir me croire quand je vais te dire que ça remonte à très, très loin.
Et si on commençait par le début si tu veux bien?
Tout a débuté par un très grand voyage
Quelques-uns de nos ponts portent le nom de ce courage.
Si toi tu les traverses tous les jours en chantant
Sache que quelques-uns avant toi en ont mis du temps.
Mon petit-enfant, est-ce que tu sais ce que c’est que le froid?
Oui c’est ça, celui dans lequel tu t’amuses des fois
Mais connais-tu celui qui s’est déjà étendu jusque dans nos lits?
En attendant qu’un jour soit bâti
Tout ce que tu es devenu.
Mon petit-enfant, tu es d’ici, tu es du froid
Et tu es d’un grand rêve dont on parle presque plus.
Sache, je t’en supplie
Que tu es l’enfant de pères enneigés et indomptables
De frères et de sœurs innombrables
Et de mères infatigables
Alors crois-moi lorsque je te dis
Que tu es l’enfant de gens bien.
Mon petit-enfant, est-ce que tu sais ce que c’est que le rire?
C’est exact, oui, le rire dans les fêtes
Mais connais-tu le rire comme il faut?
Le rire parce qu’il faut?
Je te parle du rire
Dans la défaite.
Connais-tu le rire dans le deuil?
Le rire des hommes qui s’ennuient de la maison?
Le rire pour un rien?
Le rire des femmes qui s’arrêtent jamais
De rire sans raison?
Je te demande de me croire.
Petit-enfant, tu es de tout ça
Tu es de rires et tu es de froid
Et si on te le dit plus, alors tu dois l’écrire quelque part
Dans une vitrine, sur un mur ou sur un trottoir
Si tu as, comme moi, peur de perdre ta mémoire.
Tu n’es pas obligé de craindre ce qui s’en vient.
Le temps qui se prépare sera le tien
Parce que l’avenir appartient à celui qui se souvient.
Si tes parents repassent par là
N’hésite surtout pas, reviens me voir.
Reviens jusqu’à ce qu’un jour je doive partir et tu verras
Que toi et tous ceux qui sont passés avant, vous ne vous direz jamais au revoir.
D’ici là
Mon petit-enfant
Écoute Grand-papa
Et relève toujours ta tête en public.
Tu es l’enfant unique des tâches inachevées
Tu es d’Hiver en Amérique.